HUMEURS TECHNIQUE VIGNE
Distanciation phytosanitaire vignes-riverains
Depuis le 1er janvier 2020, suite à l’arrêté du 27 décembre 2019, des distances minimales de traitement à proximité des habitations, appelées DSR (Distances de Sécurité Riverains), ont été instaurées, différenciées selon les cultures et les matériels utilisés. Les ministères de la Transition écologique, de la Santé, de l’Économie et de l’Agriculture viennent de communiquer aux préfets une instruction visant à préciser les conditions de déploiement du dispositif.
Où s’appliquent les Distances de Sécurité Riverains ?
Les distances de sécurité s’appliquent aux bâtiments habités ainsi qu’aux lieux hébergeant des personnes vulnérables tels que définis à l’article L 253-7-1 du CRPM. Et l’article L. 253-8 du Code rural et de la pêche maritime mentionne « les zones attenantes aux bâtiments habités et aux parties non bâties à usage d’agrément contiguës à ces bâtiments ».
Tous les lieux d’habitation occupés sont donc concernés dont de même les logements d’étudiants, les résidences universitaires, les chambres d’hôtes, les gîtes ruraux, les meublés de tourisme, les centres de vacances… dès lors qu’ils sont régulièrement occupés ou fréquentés. Dans les cas les plus courants (maison individuelle construite sur un terrain de quelques centaines de m²), la zone à protéger est ainsi constituée de l’habitation et de la zone d’agrément attenante, et la distance s’établit à partir de la limite de propriété.
Cependant, les chartes peuvent prévoir certains cas particuliers (activité saisonnière, périodes d’ouverture…) dans lesquels la distance ne s’établirait pas à partir de la limite de propriété, dès lors que la zone d’agrément n’est pas fréquentée régulièrement.
Comment se définit la distance ?
La distance de sécurité désigne l’éloignement minimal entre la zone à protéger et la vigne qui reçoit le produit phytosanitaire, à l’exception des produits de bio-contrôle auxquels les distances ne s’appliquent pas, et sous réserve des dispositions particulières éventuelles des autorisations de mise sur le marché-AMM.
Les distances de sécurité applicables dépendent de la culture concernée. En viticulture il s’agit de :
- 20 mètres incompressibles quand le produit contient une substance préoccupante,
- 10 mètres pour le cas général de viticulture conventionnelle,
- si vous vous trouvez en limite d’un vignoble bio, il n’y a pas de distance prévue puisque les produits appliqués sur le vignoble sont bio.
Comme le désherbage des vignes présente la particularité de ne pas viser directement la culture, mais uniquement les adventices au sol, et est habituellement effectué avec un matériel différent de celui qui est utilisé pour le traitement des parties aériennes, la charte peut prévoir que la distance applicable pour la réalisation des traitements herbicides soit de 5 mètres lorsque le matériel utilisé pour ce traitement est celui qui est utilisé pour les cultures visées par la distance de 5 mètres (pulvérisateur à rampe notamment).
Lorsque l’AMM précise, parmi les conditions d’utilisation, une distance de sécurité, cette dernière rend caduque la distance administrative, qu’il s’agisse de la distance prévue à l’article 14-1 ou des distances prévues à l’article 14-2. Les distances de sécurité donc peuvent varier selon le produit appliqué et de même selon le matériel utilisé. Des chartes départementales selon les cultures peuvent de même définir le périmètre d’application de cet arrêté.
Les chartes départementales : concertation et Covid-19
Une charte peut ne concerner qu’une utilisation spécifique de produits phytosanitaires et peut être ciblée sur une activité ou une filière agricole particulières. Le décret du 27 décembre 2019 prévoit que les organisations qui élaborent les projets de charte soumettent ces derniers à une concertation publique.
La concertation s’effectue avec les riverains entrant dans le périmètre de la charte ou leurs représentants, ainsi que les associations de défense des intérêts collectifs des habitants dont le périmètre d’action géographique correspond à celui du projet de charte. Les maires des communes concernées et l’association des maires du département sont associés à la concertation.
L’organisation à l’origine de la charte publie la charte issue de la concertation sur au moins un site internet dans un délai de 2 mois après la fin de la concertation.
Avant son approbation par le Préfet, la charte transmise par les utilisateurs est évaluée sur le caractère conforme et adapté des engagements qu’elle prévoit. L’approbation se matérialise par la publication du document sur le site internet de la Préfecture. C’est donc sur le site de la préfecture que chacun peut prendre connaissance des chartes approuvées et donc publiées.
Compte-tenu de la difficulté à mener la concertation publique, dans le contexte en cours de la crise Covid19, les utilisateurs engagés dans un projet de charte pour lequel les organisateurs s’engagent à mener la concertation dès que le contexte Covid19 le permettra, peuvent, dans l’attente de l’approbation de la charte et jusqu’au 30 juin 2020, appliquer les réductions de distance selon les modalités prévues par l’arrêté du 27 décembre 2019 (réduction des distances à 5 et 3 mètres si les agriculteurs utilisent un matériel performant (défini par arrêté ministériel).
Cela ne concerne pas les viticulteurs sans charte ou avec une charte dont la concertation n’a pas débuté, qui ne peuvent donc pas traiter à moins de 10 mètres des habitations et lieux protégés.
Les incidences pour le viticulteur
Le vigneron doit respecter les dispositions prévues par l’AMM des produits épandus et les conditions d’utilisation prévues par la réglementation (vitesse limite du vent, etc…). Et quand il utilise des produits entrant dans le périmètre des chartes à proximité d’un bâtiment habité, l’utilisateur doit appliquer les engagements figurant dans les chartes, sachant que si les conditions sont réunies (utilisation d’un matériel réduisant la dérive au niveau adapté), l’utilisateur peut réduire les distances de sécurité, en application des modalités prévues par l’arrêté du 27 décembre 2019. Il doit disposer d’un exemplaire, éventuellement dé-matérialisé, de la charte approuvée qui l’engage.
En absence de charte ou lorsque les conditions prévues par la charte ne sont pas remplies, le vigneron ne peut pas réduire les distances de sécurité, y compris lorsqu’il utilise un matériel homologué réduisant la dérive de pulvérisation.
L’information préalable des riverains
La charte peut préciser le contenu d’un message d’information préalable. L’information préalable des riverains est facultative. Elle peut contribuer à minimiser les expositions (week-end, vacances scolaires par exemple). Des exemptions pour les traitements réalisés en urgence peuvent être prévues.
Attention : les distances de sécurité peuvent ne pas s’appliquer pas aux traitements ordonnés au titre de la lutte obligatoire (par exemple dans le cas de flavescence dorée), sous réserve des dispositions spécifiques précisées par l’arrêté de lutte (ministériel, ou préfectoral par défaut). Il est important pour les riverains d’exiger, dans ce cas, l’information préalable.