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Jacques Granges a quitté ses « Vignes dans le ciel »

Jacques Granges a quitté ses « Vignes dans le ciel »

Jacques Granges, pionnier de la biodynamie, est décédé à Beudon, dans un accident vendredi 10 Juin : il traitait ses vignes avec un chenillard, quand le tracteur s’est renversé sur lui. Tragique accident qui emporte l’homme au béret pour qui « La biodynamie n’est ni un argument marketing, ni une pratique hygiéniste, mais un outil qualitatif qui améliore le sol, le raisin et le vin ».

Une riche et belle histoire d’homme

C’est une belle vie que celle de Jacques Granges, riche et généreuse, respectueuse de la nature et des autres. Comment aurait-il pu en être autrement de cet homme que ses amis décrivent comme  » un homme doux, facétieux, respectueux de la nature et des êtres, un homme avec de profondes racines et un esprit vivant porté vers le ciel. Paysan poète comme il en existe peu. » Guillaume Bodin qui était allé le rencontrer à Beudon, petit hameau au coeur du Valais, au-dessus de la vallée du Rhône, le décrit, avec son épouse Marion, comme « un délice de générosité ».

Jacques Granges

Né dans le Valais au sein d’une famille de pépiniériste et viticulteur, Jacques Granges a fait des études d’agriculture à Châteauneuf, près de Sion. il continue ensuite à Zurich à l’École polytechnique et devient ingénieur agronome en 1969. Il fait ensuite une thèse de doctorat à l’école d’ingénieur de Changins sur la lutte biologique contre les insectes, qui l’amènera à faire une partie de ses recherches aux USA.

Les vignes dans le ciel : son rêve devient réalité

Les vignes dans le ciel au Domaine de BeudonAlors qu’il rêvait depuis longtemps d’acquérir quelques hectares de vignoble suspendu au-dessus de la vallée à Beudon, l’opportunité se présente de l’acheter à son retour à Fully en Valais (Suisse) en 1971. Célibataire, il va ensuite se marier avec Marion, et le téléphérique va être le lien entre la vallée et leur vignoble, Jacques Grange l’entretenant, faisant le graissage des cables et les contrôles de sécurité. C’est d’ailleurs lors d’un entretien, alors qu’il était suspendu dans le vide, qu’un accident grave survient. Après un coma et une lourde rééducation, Jacques Grange reprend sa vie normale 5 ans après.

Beudon, les vignes dans le ciel

En 1989, c’est la conversion de l’ensemble du vignoble en agriculture biologique. Puis, vient naturellement la biodynamie. Après des débuts difficiles à cette époque en 1992, et des adaptations nécessaires, les résultats sont enfin bien visibles sur les vignes en 1997. Le domaine de Beudon s’étend sur 6 hectares à une altitude de 744 à 896 mètres !

Les difficultés du travail dans le ciel

Le téléphérique n’étant plus utilisé après l’accident de Jacques Grange, c’est le chemin escarpé qui relie le Domaine de Beudon à la vallée pendant plusieurs années. Le départ du sentier se situe à Fully-Saillon. Il est déconseillé aux personnes qui ont le vertige car à certains endroits, le chemin escarpé est en bord de falaises, avec une partie du parcours cablé. Le prendre permet cependant au visiteur de prendre conscience de la difficulté de travailler sur ces pentes.

Puis un nouveau téléphérique a été installé qui permet un accès plus facile aux visiteurs et aux vendangeurs et le transport des raisins récoltés.

Un vignoble accroché à la montagne

Le travail de vinification est fait pour partie à Beudon, notamment pour le pressurage des blancs, les jus étant ensuite descendus par pipeline dans une cuve de stockage au niveau du pied du téléphérique avant leur transfert en cave pour les fermentations. Les autres raisins sont, quant à eux transportés dans la vallée par benne, accrochées à la cabine de téléphérique.

Et c’est sans parler des vendanges ! TF1 avait choisi le Domaine de Beudon pour illustrer son reportage du 5 décembre 2015 sur « Les vendanges de l’extrême », indiquant alors : Pour accéder au domaine de Beudon dans le Valais en Suisse, il y a deux possibilités : monter à ses risques et périls à l’intérieur d’un minuscule téléphérique en bois suspendu au-dessus de la falaise ou marcher une heure le long de sentiers escarpés en s’agrippant à des câbles métalliques. 

Evidemment, tous les vendangeurs utilisent le téléphérique. C’est le domaine de Jacques et Marion, au bord d’une falaise vertigineuse, et il faut là aussi avoir le coeur bien accroché. Mais Jacques ne changerait pour rien au monde :  » J’ai fait Polytechnique à Lausanne et j’ai commencé un doctorat mais j’ai tout laissé tomber pour acheter Beudon « 

Jacques Granges, une philosophie

Jacques Grange, pionnier de la biodynamie

Jacques Granges décrit son parcours : « Pas à pas, nous avons essayé de supprimer l’utilisation de tous les produits de synthèse, en premier lieu dans les vignes isolées de Beudon. Puis dès 1991, à tous les étages de l’exploitation et pour toutes les cultures. Ainsi notre façon de produire est devenue de plus en plus écologique. Depuis 1993, nous cultivons en biodynamie. Toutes nos terres sont travaillées avec un maximum de soin de conscience et… beaucoup de passion !

Cette manière de cultiver nous permet d’obtenir des aliments ayant une qualité intrinsèque maximale Ils doivent être à même de convenir aux consommateurs les plus exigeants pour leur santé et leur bien-être. En utilisant des levures indigènes (pieds de cuve) pour la vinification, nous obtenons des vins moins alcoolisés, mais très équilibrés et qui ne donnent pas l’impression d’être moins alcooliques. »

Pour écouter Jacques et Marion Granges, l’émission de la radio suisse RTS

Merci au photographe, Olivier Maire pour ces très beaux portraits de Jacques Granges, et à Delphine Schacher et Christian Laubacher pour le portrait vidéo de Jacques Granges.



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